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vendredi 11 mai 2007

Identité nationale, la panthère est lâchée


En attendant la formation du nouveau gouvernement, et de savoir si nous aurons ce fameux ministère de l’immigration et de l’identité nationale, j’ai ressorti un livre d’Amin Maalouf de 1998 et malheureusement toujours d’actualité : ‘les identités meurtrières’.
Les identités…elles existent bien sur, elles ont tellement complexes et dynamique que ce ministère risque seulement d’opposer, dresser les Français les uns contre les autres et de nous appauvrir de la diversité.

Amin Maalouf compare les identités a une panthère car elle tue si on la persécute, elle tue si on lui laisse libre cours, le pire étant de la lâcher dans la nature après l’avoir blesser. Il note que la panthère peut comme les identités, être apprivoiser.

Parlons d’identité

Je me sens français. Il est difficile de mettre des mots sur ce sentiment. Il y a un sentiment d’appartenance à une identité commune quand, à l’étranger, je rencontre un compatriote. Nous avons des points communs, des références communes qui alimentent notre conversation et nous rapprochent. Ce sentiment d’appartenance est d’autant plus fort que cette personne a des points communs avec moi : même région, ville ou école…
Je me sens européen. Ce même sentiment d’appartenance existe aussi si, aux Etats Unis, je croise un allemand, ou un italien. Il est plus diffus et moins précis, mais existe d’autant plus que nous sommes dans un pays très différent de l’Europe.
Je pourrais aussi parler de la francophonie et du plaisir de parler français à l’étranger quand on rencontre un Suisse ou un Belge. Il y a la aussi un sentiment d’appartenance.
Les identités sont donc multiples. Elles sont un peu semblables à des ensembles imbriqués les uns dans les autres, avec des intersections, un coeur, et des liens qui s’atténuent lorsque l’on s’éloigne du coeur. Je rajouterais que ces ensembles ne sont pas absolus et se définissent, surtout quand on se rapproche du noyau, par rapport à la perception de chaque individu.
A ce titre je pense que l’on peux parler et échanger sur ce qu’est l’identité française. Mais….

Comment se forment les identités collectives

L’identité est extrêmement complexe et diverse, elle est forcément différente pour chaque individu.
Je pense que l’identité est dynamique. Non seulement pour un individu qui au cours de sa vie, de ses rencontres va évoluer mais également bien sûr pour une nation. L’identité collective d’un peuple se construit par la base. Par la somme des individus. Elle n’est pas définie, décrétée, imposée par le haut. L’identité est fugace et insaisissable. Elle s’enrichit des apports de tous et bine sur des apports des nouveaux citoyens venant de cultures et de religions différentes d’où son incroyable dynamisme.
Son caractère insaisissable rend un autoritarisme impossible, c’est le libéralisme qui l’emporte en matière d’identité car elle est construite par les individus, sans coordination.
Amin Maalouf présente deux formes d’héritage dont chacun est dépositaire. L’un vertical qui vient des ancêtres, traditions et communauté religieuse et l’autre horizontal venant de l’époque et des contemporains. Il souligne que le dernier semble le plus prépondérant, mais que paradoxalement, nous nous réclamons plus de l’autre.
Au temps de la mondialisation, la dimension horizontale est très importante. Elle peut être négative (uniformisation) ou positive (universalisation) et sans développer ces points je soulignerais donc que cette volonté de centralisme de l’identité française est vouée à l’échec face a la dimension de la mondialisation. Nous sommes ouverts au monde par les flux migratoires, par la facilité à voyager et à communiquer instantanément avec toute la planète. Notre identité est aussi façonnée par ces forces.

Imposer, centraliser l’identité est impossible, voir dangereux.

Nous ne combattrons pas l’uniformisation en nous rattachons à la dimension verticale de l’identité. L’universalisation doit être au cœur de la démarche politique t nul besoin d’un ministère de l’identité nationale pour cela. Ce ministère pensant lutter contre l’uniformisation ne servira à rien face aux forces en présences.
Plus grave encore. L’identité étant dynamique et complexe, centraliser la notion d’identité française c’est nier cette complexité et c’est se mettre en position de ne pas pouvoir évoluer et suivre ce dynamisme. Le risque de vouloir la définir, la centraliser, la contrôler même, est de créer des rejets car cette définition sera imparfaite, inadaptée. Ceux qui ne s’y reconnaîtront pas se sentiront attaqués… mais c’est peut-être le but recherché quand on entend des phrases simplistes comme ‘la France tu l’aimes ou tu la quitte’. On centralise, on étatise l’identité et si ça ne plait pas libre a chacun de partir ou de ne pas venir, comme si ce choix existait de façon aussi clair et simple ! Comme si celui qui ne se fond pas dans le pseudo moule n’avait pas la légitimité à être Français, c’est a dire à être ce qu’il (elle) est !
L’exclusion générée créera des tensions, les autres deviendront une menace. Pour chaque coté d’ailleurs, pour ceux qui se sentent représentés, intégrés dans la définition d’identité française et ceux qui se sentent exclus. Chacun se retranchera derrière la partie de son identité qu’il ressent comme la plus attaquée, On exacerbe donc les identités, on génère des tensions en opposant les uns aux autres. On exclut forcément. Les positions se durciront et le cycle vicieux de la haine, de la peur de l’autre et du rejet sera enclenché.

Vision négative peut être. Simplifiée, bien sur, le sujet est très vaste. J’aurais pu m’étendre sur l’immigration et les futurs besoins qu’aura la France dans ce domaine mais j’ai préfère m’attacher a ce concept d’identité.
Un gage de paix sociale et de société harmonieuse serait une France ouverte qui n’a pas peur des autres et des différences qui acceptent de changer en intégrant ce que les individus apportent de leurs cultures respectives. Ce n’est pas une société dans laquelle on impose une culture monolithique héritée du passé, mais dans laquelle on s’enrichit et s’épanouit de l’apport des autres cultures. Je ne comprends pas comment un ministère de l’identité nationale peut réaliser cela.

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