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lundi 21 mai 2007

Assistanat, effets de seuil et Martin Hirsch


Depuis que Martin Hirsch a été nommé Haut Commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, les médias nous parlent d’effets de seuil. Je souhaite explorer ce que sont ces effets de seuils et comprendre cette approche de la solidarité et de la lutte contre l’exclusion.

Définition d’un effet de seuil : tout ou rien

Tout d’abord une définition de ce qu’est un effet de seuil :
De façon très générale, un effet de seuil est l’apparition de phénomènes quand une variable atteint une valeur donnée.
Un peu rébarbatif.
De façon plus intuitive, on peut opposer un effet de seuil à une situation où il y a une continuité et où l’on voit le phénomène apparaître progressivement quand la variable varie.
Passons au domaine des minima sociaux. L’idée est que ces minimas créent des effets de seuil, car au-delà d’un certain revenu ou au-delà d’un certain nombre d’heures travaillées les minima disparaissent. Ils ne sont plus versés. Il y a une discontinuité et non pas une progressivité dans leur disparition. C’est tout ou rien.

Un rapport de la commission des affaires sociales du sénat de 2005 (‘Minima Sociaux et reprise d’activité’) soulignait non seulement la complexité du système, de nombreuses conditions donnant droit a l’un des 9 minima sociaux, mais également, l’apparition d’effets de seuil. C’est-à-dire une perte brutale de ressources en cas de retour à l’emploi.

Un changement de philosophie

On retrouve souvent deux camps extrêmes et caricaturaux quand on explore les avis sur les minima sociaux et sur le rôle de l’assistanat.

- D’un côté, des partisans sans concessions de l’aide aux plus pauvres, soutenant sans distinctions toutes mesures d’aide et d’assistance. Au centre de cette idée, le sentiment que toute aide est bonne car c’est un pas dans la bonne direction, et qu’il faut combattre pour préserver les acquis.

- De l’autre, les anti-assistanats. Ceux qui y voient une prime a l’inactivité et soutiennent que l’assistant n’est pas souhaitable car il n’incite pas au travail, il nivelle par le bas en créant une société d’assistés.

Dans les deux cas c’est mettre le débat sur le terrain de la morale et les positions se radicalisent en s’accrochant à des dogmes.
C’est une approche différente, loin des clichés et raccourcis, qui est prônée par Martin Hirsch qui lui, souhaite œuvrer pour vaincre la pauvreté.


Effet de seuil et reprise du travail


Martin Hirsch a présidé en 2004/2005 un groupe de travail ‘familles, vulnérabilité, pauvreté’. Une des propositions de ce groupe était la création du Revenu de Solidarité Active (RSA).

La logique est centrée sur l’effet de seuil : un retour au travail peut se traduire par une baisse de revenu. Notre système d’aides crée des poches, des trappes d’assistanat, non pas parce que les personnes ne souhaitent pas s’en sortir ou ne recherchent pas d’emploi préférant profiter du système, mais parce qu’il n’est pas intéressant financièrement de le faire.
Il faut donc briser cette discontinuité et introduire de la continuité: il doit y avoir une incitation financière au retour au travail. Le RSA pourrait donc combiner les minima sociaux et aides fiscales, les aides aux logements. À chaque heure travaillée, le RSA baisserait, mais de façon moindre que le gain procuré par le travail. L’assistance est préservée et elle ne disparaît pas d’un coup mais progressivement.

Critiques

On retrouve plusieurs types de critiques au RSA :

- C’est une mesure de renoncement et une acceptation que notre société n’est pas capable de fournir un travail correctement payé a tous.
Je pense qu’en effet, la productivité de certains emplois ne garantit pas un salaire permettant de vivre décemment et que les aides sont nécessaires.

- C’est un aveu et un ralliement au camp de ceux qui pensent que l’assistance découragerait le travail.
J’ai parlé plus haut de cette approche que je considère dogmatique. Il faut trouver un juste milieu, préserver l’incitation à travailler tout en aidant les plus pauvres.

- Le coût de cette mesure. J’ai trouvé différents chiffres, entre 3 et 8 milliards…
La critique du coût est en biaisée car il faudrait mesurer le coût pour la société des effets de seuils créés par les mesures d’aides standards.

- On rajoute une couche au système distributif sans évaluer les mesures existantes.
Je suis plutôt en phase avec cette critique car le risque est de complexifier le système et de construire une véritable usine a gaz sans lisibilité. Il faut également un effort de simplification.

Conclusion

Cette approche est pour moi dans la même famille qu’une idée d’impôt sur le revenu négatif pour les petits salaires. L’idée étant, pour l’état, de compléter les revenus du travail si ceux-ci ne permettent pas de vivre décemment. L’état a un rôle important à jouer dans la lutte contre la pauvreté. Il faut aider, tout en rétablissant les signaux et les incitations économiques, en se sens combattre les effets de seuil est essentiel.

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